Les périodes de secousses sur les marchés financiers correspondent à une perte de repères pour les investisseurs. L'incertitude est plus redoutée que les mauvaises nouvelles économiques et financières. Les lendemains de correction seront forcément bien différents de la période précédente. Au-delà de la recherche de points de stabilisations généraux pour entamer une stratégie nouvelle, c'est celle des concepts nés du changement de donne sanctionné sur les marchés qui est au centre des réflexions des gérants d'actifs. À la pêche aux décotées et, aussi, aux sous-performeurs de la période précédente, on trouve un secteur central pour l'économie : les banques.
Les cours de Bourses donnent la mesure de la méfiance des investisseurs vis-à-vis du secteur bancaire. Par rapport aux plus hauts de janvier – quand la sphère financière pariait sur des planètes alignées – la baisse des indices européens du secteur est de l'ordre de 30 %. C'est aussi la perte moyenne encaissée par les actions bancaires italiennes ou espagnoles. Les Allemandes creusent le trou (- 41,5 % pour le DAX Banks) et les Françaises résistent seulement un peu mieux (-21 % pour le CAC Financières). En élargissant le spectre, on pointe les banques britanniques à -20 %, les américaines à -15 % tandis que les Chinoises réduisent les déchets à 7,5 %.
Si on revient dix mois en arrière, le statut des bancaires a été bouleversé par une évolution asymétrique des économies, par l'ouverture d'une ère nouvelle dans la gestion monétaire de la Réserve Fédérale américaine, et par des risques géopolitiques : guerre commerciale, Proche Orient (et effets sur les cours du pétrole), Brésil, Brexit, Italie, et même désormais Allemagne.
Ce qui saute aux yeux à l'étude des cours est l'accélération du dernier mois : -10 % pour les actions des banques américaines, espagnoles ou françaises ; -13 % en moyenne pour les Européennes ; - 16 % pour les Allemandes ; - 20 % pour les Italiennes.
La donne change et le secteur a suivi la tendance générale à la correction, l'amplifiant dans certains cas, en tout cas ne l'amortissant pas. La baisse précédente n'avait pas mis les titres à l'abri de la correction.
Derrière cette évolution plus que médiocre, ce sont en effet pas moins de dix années de baisse que l'on constate. L'indice Eurostoxx des banques affiche un recul de 52 % en dix ans et même de 60 % en neuf ans.
Les excès de la finance qui avaient conduit à la crise des années 2007-2008 ont été soignés. L'économie mondiale a retrouvé la croissance, le système financier mondial, mais aussi européen après la crise de l'euro, a été sauvé. On sait que le mal a été traité par le mal, la course à plus de dettes sous la pression des grandes banques centrales et en premier lieu de la Réserve Fédérale, ayant en quelque sorte amorti l'endettement excessif d'avant crise.
Les banques ont été sauvées par les États et les banques centrales et, ensuite, semblent avoir bénéficié d'une certaine indulgence de la part des pouvoirs politiques. Derrière l'administration américaine – celle des présidences Obama -, les législations des grands pays ont donné la priorité à la reconstitution des profits des établissements bancaires. Ce faisant, malgré les déclarations volontaristes, elles n'ont pas toujours encadré la finance pour éviter que se reconstitue le phénomène de bulle qui avait manqué de peu d'emporter le système bancaire mondial.
Les cours des actions bancaires relativisent cette impression. Certes, les établissements ont retrouvé des marges et ont peu perdu de leurs marges d'action, mais les règlementations qui peuvent être actionnées en cas de débordement ou simplement de besoin restent présentes dans les esprits des investisseurs.
De fait, les fameux stress tests de la BCE ont bel et bien limité le champ d'action des banques européennes et, d'une façon plus globale, les autorités monétaires ont renforcé leurs contrôles. Elles l'ont fait sur un fond de forte montée des encours bancaires, et donc des risques. Le cumul mondial de dettes à un niveau inconnu – plus de 230 milliards de dollars soit 2,9 fois le PIB - explique aussi la décote affectée aux actions des banques : les excès ne sont pas éliminés, au contraire.
Alors que les grandes banques centrales ont passé le pic de liquidités et devraient en reprendre à partir de 2019, les risques spécifiques entraînent une grande prudence : Italie (et son Budget), Chine (qui a dû interrompre sa stratégie de normalisation financière), pays émergents (sous pression de l'inflation, du change et des balances de paiement), Royaume-Uni (qui doit gérer le Brexit), Allemagne (système bancaire fragile et politique qui perd de sa stabilité), montages à levier du Private Equity, …
La résultante est le constat boursier et, finalement la décote des capitalisations par rapport aux actifs, et des ratios d'évaluation de l'ordre de 10 fois les bénéfices opérationnels pour les banques américaines et de moins de 8 fois pour les européennes. Des multiples qui se retrouvent dans les beaux rendements des actions.
Les actions du secteur sont considérées comme un bon support pour jouer l'économie. Au moment de l'inflexion de la croissance, elles ne sont pas forcément en tête des sélections. Mais, en sens inverse, la hiérarchie des rendements sur les marchés de l'argent en fonction de la durée se reconstitue sous la pression confirmée des Banques Centrales. Une situation qui reconstitue les marges de transformation, gonflant finalement les profits.
Au total, la décote des actions bancaires apparaît comme une opportunité dans une perspective longue. On notera l'avantage des banques européennes qui, à l'exception des italiennes, des portugaises et des irlandaises, ont fortement réduit les créances douteuses, les amenant à moins de 5 % du total des concours.
En privilégiant la qualité, les modèles de banque de détail et la solidité des bilans, on devrait trouver des opportunités. Les risques spécifiques (Italie, Portugal, Irlande, Royaume-Uni, Allemagne) conduisent à retenir les établissements français et espagnols. Des rendements du dividende de 6 % à 7, 8 % pour les quatre grands établissements français pourraient permettre d'attendre. Dans le choc, ceux de BBVA et Banco Santander, dépassent 5,5 % et peuvent justifier de guetter une stabilisation