L'évènement financier depuis le début de l'année ? Un événement qui s'est confirmé depuis le début juin. En chiffres cela se traduit par une hausse de 270 % depuis janvier portée par plus de 50 % dans les cinq dernières semaines. L'actif est le bitcoin. En se stabilisant – on n’imagine pas durablement – au-dessus de 13 000 dollars, la vedette des cryptomonnaies n'est pas loin de ses records du début de l'année 2018.
Il y a bien sûr un facteur particulier : le dopant qu'a constitué l'annonce mi-juin du lancement de le Libra, la cryptomonnaie gérée et émise par Facebook. Sans préjuger de la fonction libératoire à terme de cette monnaie, un palier a été franchi avec l'entrée dans le jeu d'un premier géant de l'internet. Sans attendre, on peut penser que, dans un premier temps, le Libra pourra être massivement utilisé pour acheter des bitcoins.
Les atouts du bitcoin – comme la gestion de la monnaie sans intervention d'une banque centrale et sans effet des budgets publics, la confidentialité de la détention et des échanges, ou un gisement de création qui n'est pas infini – et ses défauts – en premier lieu l'absence de rendement en dehors d'une éventuelle plus-value ne sont pas le contraire de ceux de l'or. Ce n'est donc sans doute pas un hasard de retrouver l'once à des niveaux inconnus depuis 2013 : 10 % de hausse depuis le début de l'année, ce n'est pas le loto des cryptomonnaies, mais ce n'est pas si mal.
La forte résistance qui coiffait l'once de métal jaune depuis 5 ans au-dessous de 1.385 dollars a été enfoncée après l'annonce par Jerome Powell il y a un mois de l'inversion durable de la politique monétaire. Le patron de la Réserve Fédérale, suivi depuis par le conseil des gouverneurs de la Banque Centrale Européenne, a donné le ton à toutes les anticipations : les taux vont rester « très très bas très très longtemps ». Aux taux directeurs bas, s'ajoutent les conséquences sur les taux obligataires des liquidités surabondantes qui ne seront pas réduites par les banques centrales (on attend même de nouvelles injections) et l'inflexion réelle du cycle de croissance. On estime aujourd'hui à plus de 13.000 milliards de dollars le stock de dettes dégageant des taux négatifs.
L'attractivité de l'or est relevée par cette situation des marchés de l'argent. Sa détention ne se compare pas avec des placements monétaires ou obligataires rapportant sensiblement plus que zéro.
Les catalyseurs dopant les cours du métal jaune sont de nature à inverser un momentum du placement - c'est à dire la tendance en cours - qui est encore légèrement négatif. Pour autant, sur un marché autant soumis aux indicateurs techniques que l'est celui de l'or, les indicateurs du rebond sont en vue. Si les fameux 1.400 dollars devaient être franchement dépassés, cette résistance pourrait devenir le point support d'un rallye de hausse. Les chartistes visent jusqu'à 1.700 dollars, ce qui donne un potentiel de 20 %. Ce retour dans les meilleurs prix de 2011-2012 doit passer, toujours selon les spécialistes de l'analyse technique, par des points intermédiaires de 1 485, puis 1.585 dollars.
Ce qui est peut-être le plus suivi pour anticiper sur ce marché particulier, c'est la sécurité. L'or est perçu comme un recours quand le dollar baisse et suit aussi une tendance qui n'est pas contraire à celle du yen. Il est doublement porté par la gestion monétaire de la Fed : taux bas qui relativisent le manque de rendement et pression sur le dollar. Il est aussi un recours naturel au-delà de la diversification des portefeuilles face aux risques géopolitiques : guerre commerciale, incertitudes sur la croissance mondiale, tensions au Proche-Orient, nouvelles tensions intra-européennes...
Dans l'univers des taux bas et même négatifs, l'or a retrouvé des attraits liés à la protection qu'il peut offrir contre les à-coups des marchés, en présentant finalement un risque de perte limité. Le manque de solutions alternatives de diversification est le principal moteur de la tendance haussière qui semble retrouvée.
Les prises de positions en ETPs où les positions acheteuses à terme ne sont pas pour le moment de nature à inquiéter. Les achats continus des banques centrales depuis plusieurs trimestres non plus. Le Bitcoin à 13 000 est peut-être un indicateur de plus pour annoncer une once d'or à sensiblement plus que 1.400 dollars.