Après un semestre marqué par un rebond qui a réévalué les multiples de valorisation, les Bourses rentrent dans la phase de l'épreuve des publications des résultats semestriels. Confirmations ? Risques ? Tournant
La performance des actions au premier semestre et jusqu'à la mi-juillet a d'abord été une réaction au revirement des Banques Centrales. Derrière la Réserve Fédérale, les stratégies d'assainissement et de désendettement des économies ont été spectaculairement abandonnées au début de l'année. La mobilisation pour soutenir la croissance mondiale a été sonnée.
Les grands argentiers se sont résignés à réagir face à une réelle dégradation des indicateurs économiques avancés, en premier lieu les fameux PMI ou ISM mesurant les intentions des directeurs d'achat des entreprises. La chute des indices boursiers de l'automne 2018 avait précisément trouvé sa source dans l'affichage de politiques monétaires resserrées pouvant accélérer l'inflexion du cycle.
La victoire des marchés sur les banquiers centraux – sur la Fed pour tout dire – et les perspectives de baisses de taux directeurs et de nouvelles injections de liquidités, se sont traduites par un soulagement généralisé des investisseurs qui a provoqué l'envolée des Bourses : retour dans les plus hauts de l'année dernière en Europe, nouveaux records à Wall Street.
Dans un monde des marchés de l'argent offrant peu ou pas de rendement, les actions ont répercuté la baisse des taux obligataires qui a anticipé sur les actions concrètes des banques centrales.
La validité à terme des cours retrouvés ou franchis pour la première fois ne peut se limiter durablement à un effet brut de baisse des taux. Pour des cours de Bourse qui actualisent des profits et des dividendes à venir, ces données réelles venant des entreprises sont autant déterminantes que le taux d'actualisation. Après avoir anticipé le pire au quatrième trimestre 2018, les cours doivent prendre en compte les perspectives qui sont liées aux scénarios généraux de conjoncture et, bien sûr, les comptes semestriels.
Du point de vue macroéconomique, on a aujourd'hui le sentiment, que les anticipations ont été excessivement pessimistes. C'est en tout cas la leçon que l'on peut tirer des données publiées cette semaine en Chine et aux États-Unis pour le mois de juin.
Du côté chinois, les indicateurs peuvent être perçus comme divergents, mais le deuxième trimestre traduit une amélioration par rapport au premier, dans la gestion publique d'une stabilisation en ordre de l'inflexion de la croissance. Aux États-Unis, les ventes au détail annoncent un net rebond de la consommation sur l'ensemble du trimestre et le regain (0,4 %) de l'activité manufacturière limite un peu la casse sur la période avril-juin. Au total, la situation meilleure qu'anticipée conduira à un léger relèvement des scénarios du deuxième semestre.
Reste l'Europe qui est à la traîne et pénalisée par une réelle panne de l'industrie allemande qui commence à se répercuter sur les services.
À cette exception (le cas japonais restant spécifique et ses anticipations peu infirmées), les chiffres réels confirment l'optimisme relatif des investisseurs mesuré aux cours de Bourse. Non seulement les taux sont bas et durablement bas, mais l'économie – pour les deux plus grands pays du Monde en tout cas- tient et fait même un peu mieux que prévu.
Restent les éléments les plus réels : les profits. En passant de la macroéconomie à la microéconomie, il peut y avoir des effets de bord et même des divergences. En amont – c'est cette semaine que les premières publications sont présentées par les compagnies américaines – on peut faire preuve d'une certaine sérénité : les analystes financiers ont sans doute révisé très (trop?) généreusement à la baisse leurs estimations pour cette année. On devrait se situer plutôt au-dessus des projections.
Cela posé, au-delà de l'exercice en cours, les anticipations à plus long terme restent très optimistes : pour 2020, les consensus tournent autour de 10 % sur presque toutes les zones, après 3,5 % à 5 % cette année. À l'analyse des cours de Bourse, on a le sentiment que les investisseurs prennent le pari – risqué- de ces consensus pour 2020.
L'optimiste pour 2020 et au-delà reste fort et très anticipé par les Bourses qui abordent à un niveau élevé la période des semestriels. Les multiples d’évaluation des bénéfices sont repassés au-dessus de leurs moyennes historiques. On ne doit pas perdre de vue que le deuxième trimestre de cette année va montrer une stagnation des profits un peu partout et même une récession aux États-Unis ou ce sera un deuxième trimestre de contraction.
C'est avec des ratios élevés que les investisseurs vont devoir enregistrer les semestriels qui ne décevront pas, mais, aussi, sans doute de premières révisions pour 2020. Ce qui incite à limiter l'exposition ou, en tout cas, à la concentrer sur des dossiers à forte visibilité. Ce sont ceux qui sont bien sûr les plus chers en termes de Price Earning. Le mystère de marges maintenues avec des prix de vente inchangés et de (légères) hausses de salaires pourrait bien être au centre des interrogations au-delà de l'actualité immédiate des entreprises.