Revue des marchés du mois de février 2022
Les marchés financiers ont subi une violente correction au mois de février. Dans un premier temps, l’inquiétude des investisseurs s’est portée sur les risques liés aux pressions inflationnistes persistantes et le rythme de remontée des taux directeurs des banques centrales. Les présidents de la Fed et de la BCE ont progressivement durci leurs discours, laissant entrevoir la fin des politiques monétaires ultra-accommodantes. Dans un second temps, la dégradation de la situation géopolitique a pris le dessus. L’échec des négociations diplomatiques a entrainé le 24 février l’invasion militaire russe en Ukraine et provoqué une onde de choc sur les marchés financiers. La volatilité observée depuis le début de l’année s’est considérablement amplifiée après l’offensive militaire et l’annonce des premières sanctions occidentales contre la Russie. Le choc sur les prix de l’énergie et des matières premières qui en découle constitue une réelle menace sur la croissance économique et un scénario de stagflation devient de plus en plus probable.
Outre-Atlantique, la FED a évoqué la possibilité de relever ses taux de manière accélérée si l'inflation ne montre pas de signes de ralentissement. Jerome Powell a annoncé que l'inflation pourrait continuer de progresser dans les prochains mois, portée par l’envolée du prix du pétrole, même si la hausse des prix devrait selon lui ralentir dans le courant de l'année. La Fed doit faire face à des prix à la consommation qui ont connu ces 12 derniers mois leur plus forte hausse depuis 40 ans aux Etats-Unis (+7,5%). Lors du dernier cycle de resserrement monétaire, entre 2015 et 2018, la Fed avait opté pour une approche graduelle sans jamais relever ses taux directeurs plus d'une fois par trimestre. La banque centrale semble désormais décidée à accélérer ce processus en augmentant ses taux à chacune de ses prochaines réunions. Des hausses de taux pourraient ainsi intervenir en mars, en mai et en juin. Le sujet brûlant de la réduction du bilan colossal de l'institution qui s'élève désormais à 9.000 milliards de dollars a été abordé mais aucune décision n'a été prise pour le moment.
De son côté, la BCE a adopté un ton beaucoup plus ferme qu'attendu, face à une inflation qui semble s'installer. Christine Lagarde a affirmé que cette inflation devrait rester élevée plus longtemps qu’anticipé et que, par rapport aux prévisions de décembre, les risques entourant les perspectives d'inflation sont orientés à la hausse. La banquière centrale ouvre ainsi la porte à un resserrement de la politique monétaire. En revanche, les récents événements géopolitiques et l’envolée du coût de l’énergie pourrait contrecarrer les prévisions de croissance de la BCE. L’institution fait donc face à un dilemme entre lutter contre l’inflation et risquer de fragiliser encore plus la croissance européenne. Christine Lagarde assure qu’aucune décision de long terme ne sera prise dans ce climat trop incertain. La prochaine réunion du 10 mars prochain sera particulièrement suivie par les investisseurs.
L’invasion militaire russe a entrainé une envolée du prix de l’énergie. Le pétrole a notamment dépassé le seuil des 100 dollars le baril pour la première fois depuis juillet 2014. La Russie, premier exportateur mondial de pétrole en 2019, pourrait être touchée par des sanctions occidentales sur ses exportations ou bien décider de réduire ses livraisons aux pays de l’Union Européenne en représailles. Concernant le gaz, la certification du gazoduc Nord Stream 2 qui devait relier la Russie à l’Allemagne a été suspendue par le chancelier allemand Olaf Scholz. Les pays européens se retrouvent entravées sur la scène géopolitique face à cette dépendance énergétique : 26% du pétrole et 38% du gaz naturel utilisés dans l’Union sont importés de Russie en 2020. Catherine MacGregor, directrice générale d’Engie, alerte sur les conséquences dramatiques d’une rupture d’approvisionnement du gaz russe qui rendrait très difficile la constitution des réserves pour l’hiver 2022-2023.
Les places financières européennes terminent le mois en baisse (Euro STOXX 50 dividendes réinvestis : -6,0%), avec d’importantes disparité de performances entre les secteurs. Les secteurs privilégiés par les investisseurs ont été les ressources naturelles (+8,5%), les services aux collectivités (+1,9%) et le secteur pétrolier (+1,2%) qui bénéficie de l’envolée des prix du pétrole. Le secteur de la distribution affiche la moins bonne performance sur le mois (-10,3%), suivi par le secteur bancaire (-9,3%) et les assureurs (-7,8%).
Dans cet environnement de marché très volatil, les entreprises cotées ont réalisé une très bonne saison de résultats annuels. Portés par l’envolée du prix de l’énergie, Total Energies réalise une année record avec un bénéfice net de 16 milliards de dollars. Du côté des Etats-Unis, les publications des entreprises du S&P 500 sont solides. En revanche, le conflit ukrainien et les sanctions envers la Russie vont impacter les entreprises européennes qui sont implantées en Russie ou dépendantes des matières premières russes. C’est notamment le cas de Michelin qui est contraint d’arrêter des sites de production faute de composants de base provenant de Russie.