Revue des marchés du mois de Juin 2022
Le mois de juin a été marqué par une violente correction des principales bourses mondiales. La première moitié de l’année 2022 est l’une des pires de ces vingt dernières années sur les places financières avec des performances similaires aux premiers semestres 2020 (crise du Covid) et 2008 (crise financière). Les investisseurs se sont montrés particulièrement inquiet face au risque de récession en Europe et aux Etats-Unis. En effet, le resserrement rapide de la politique monétaire par les banquiers centraux pour faire face à une inflation record pourrait provoquer un ralentissement brutal de la croissance économique. L’inflation qui culmine désormais à 8,6% en rythme annuel en Zone Euro résulte des violentes perturbations des marchés de l’énergie et des matières agricoles liées au conflit en Ukraine. Les forces terrestres de Vladimir Poutine se concentrent désormais sur le Donbass qu’il souhaite conquérir totalement et les forces maritimes continuent leur blocus du port stratégique d’Odessa.
L’OCDE a significativement revu à la baisse ses perspectives économiques : la croissance mondiale devrait s'établir à +3 % en 2022 contre +4,5 % anticipé en décembre dernier. Pour 2023, la prévision est de seulement +2,8 %. L’institution prévient que ces perspectives évolueront en fonction de la guerre en Ukraine qui pèse lourdement sur l’activité économique et les prix. La flambée des prix de l’énergie et des prix alimentaires nécessitera sans doute des interventions des pouvoirs publics qui viseront à compenser l’impact négatif sur les ménages et les entreprises. En France, la croissance au titre de 2022 est désormais attendue à +2,3 % contre +4,2 % précédemment. Concernant l’inflation, elle devrait être plus forte qu’initialement anticipée et atteindrait 5,6 % dans l’Hexagone cette année selon Eurostat. Il est à noter que l’inflation française sera inférieure à celle de la Zone Euro grâce au bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité.
Aux Etats-Unis, la publication de chiffres d’inflation record conforte la Fed dans la conduite du resserrement de sa politique monétaire. Jerome Powell a déclaré que la pandémie avait déstabilisé l'économie de telle sorte qu'elle pourrait davantage alimenter l'inflation, ce qui pourrait compliquer le pilotage de la croissance économique par les banques centrales. Également, la guerre en Ukraine et ses répercussions sur les prix de l'alimentaire et de l'énergie complexifient la mission de la Fed. Afin de combattre une inflation galopante, le banquier central a indiqué qu’une autre hausse de taux serait justifiée à l’issue de la prochaine réunion de la banque centrale, les 26 et 27 juillet prochains, celle-ci est désormais attendue à 75 bps par les marchés. Au total, alors que les taux des fonds fédéraux se situent aujourd’hui entre 1,5 % et 1,75 % après trois hausses depuis mars, dont +0,75% en juin, les responsables de la Fed voudraient les ramener dans une fourchette de 3 % à 3,5 % en fin d'année. La Fed espère ainsi ralentir suffisamment la croissance de l'économie américaine pour faire diminuer l'inflation mais sans provoquer de récession.
Du côté de la BCE, une réunion d’urgence s’est tenue le 15 juin à l’issue de laquelle a été annoncé la création, à partir de juillet, d’un mécanisme anti-fragmentation de la dette des états. Ce mécanisme permettrait ainsi de lutter contre des écarts trop importants entre les taux des emprunts souverains des pays cœurs face à ceux des pays périphériques en Zone Euro. Si ce mécanisme se révélait efficace, la BCE serait plus libre pour resserrer sa politique monétaire et lutter contre l’inflation sans se soucier de l’élargissements des spreads entre les pays de la Zone Euro. Christine Lagarde a également affirmé la décision de la BCE de relever ses taux d’intérêt directeurs à deux reprises pendant l’été avec pour objectif de ramener l’inflation vers son objectif à long terme de 2 %.
Le mois de juin a été marqué par des signes positifs de reprise économique en Chine. L’assouplissement des restrictions imposées pendant deux mois à Shanghai a permis un fort redémarrage des échanges commerciaux qui est largement imputable à l’activité du port de la capitale économique qui tournait désormais à 95 % de ses capacités à fin mai. Les publications des statistiques économiques en juin ont été encourageantes avec une balance commerciale pour le mois de mai largement au-dessus des attentes à 78,8 milliards de dollars d’excédent contre 57,7 milliards attendus. Également, le PMI manufacturier Caixin est ressorti au-dessus des attentes à 51,7 contre 50,2 attendus.
Le marché de l’énergie est resté au cœur des préoccupations des gouvernements européens. En Allemagne, le seuil d’alerte du plan national d’approvisionnement en gaz a été franchi et on ne sait pas à l’heure actuelle si l’Allemagne pourra éviter une pénurie de gaz cet hiver ce qui serait notamment préjudiciable à la croissance économique. La réduction des livraisons de gaz russe décidée par Vladimir Poutine inquiète l’Europe qui cherche désormais d’autres sources d’approvisionnement en gaz, dont majoritairement du LNG américain, pour remplir ses réserves.
Les places financières européennes terminent le mois en baisse (Euro STOXX 50 dividendes réinvestis : -8,7%), avec d’importantes disparités de performances entre les secteurs. Les secteurs privilégiés par les investisseurs ont été le secteur de la santé (-2,6%) dont les entreprises se montrent résilientes dans cet environnement, le secteur de la grande distribution (-3,2%) et le secteur de la consommation cyclique (dont le secteur du luxe, -3,4%). Le secteur des matières premières (-19,0 %) enregistre la moins bonne performance sur le mois, fortement impactée par la baisse du cours des métaux liée aux craintes de récession. Le secteur de l’immobilier (-16,5%), pénalisé par la hausse des taux d’intérêts, et le secteur des voyages et loisirs (-14,8%) sous-performent également.
Du côté des entreprises, l’augmentation des coûts liés aux matières premières, au transport et aux salaires mettent la période de publication semestrielle à risque dans la mesure où les analystes n’ont pas à notre sens révisés à la baisse les prévisions des bénéfices des entreprises pour 2022 et 2023 notamment en Europe. En effet, certaines entreprises se sont récemment montrées plus prudentes quant à leur activité ; le PDG de BASF a annoncé que l’environnement macroéconomique se dégradait et que l’inflation pèsera sur les résultats du second semestre. Dans le secteur de la construction, le management du groupe irlandais Kingspan a annoncé de son côté un net ralentissement des prises de commandes sur les mois de mai et de juin. Dans ce contexte, la publication fin juillet des résultats semestriels seront à suivre de près.